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Outremont Autrement
25 décembre 2005

Conte de Noël

Les dépenses du Petit Roi

Il était une fois un Petit Roi d’un royaume lointain.

Ce Petit Roi voulait doter son royaume d’une construction à la gloire de ses sujets, bien sûr, mais aussi à la gloire de lui-même. Ce que le Petit Roi aimait par-dessus tout, c’était régner et faire plaisir à ses amis.

Son  petit royaume n’était pas très riche même si des personnes très riches y avaient construit leurs luxueuses résidences. Sans coffres bien remplis, sans ressources supplémentaires, les écus dépensés dans ce projet ambitieux allaient nécessairement manquer ailleurs.

« Comment faire accepter ces folles dépenses par mes sujets et faire en sorte que ceux-ci m’applaudissent quand même » s’est demandé le Petit Roi. Il faut dire que celui-ci était entouré par une cohorte de conseillers, dont l’un, le Premier Conseiller, était spécialisé dans l’art de faire croire ce que disait le Petit Roi. Les autres, plutôt des hommes de loi portant cravates, savaient tirer les ficelles du bien-paraître.

Le Petit Roi a annoncé pompeusement une construction de 6 600 000 écus après avoir fait une évaluation des travaux. Une liste complète avait été dressée avec, entre autres, l’ajustement pour 150 000 écus des portes et des fenêtres d’un bâtiment existant à être intégré à la nouvelle construction, l’aménagement de la cour et des espaces d’arrivée des calèches pour 320 000 écus, l’aménagement d’un jardin attenant pour 150 000 écus.

Le Petit Roi, très peu intéressé par l’art et la culture, n’avait pas cru bon de confier la construction à des architectes. C’était des constructeurs qui avait la mainmise sur le projet. Les architectes n’étaient que la cinquième roue de la charrette. Très vite, les constructeurs du Petit Roi se rendirent compte qu’il n’y avait pas assez d’argent. « Qu’à cela ne tienne, pensa le Petit Roi, dans un premier temps on va retirer certains travaux tout en gardant le total de 6 600 000 écus. Mes amis les constructeurs auront la même somme à leur disposition. Ils seront contents. Quant à mes sujets, ils n’y verront que du feu. Je vais leur dire que le montant dépensé est bien de 6 600 000 écus ». Ce qui, en soi, n’était pas tout à fait faux. Mais c’était pourtant loin d’être juste.

Tout allait bien pour le Petit Roi puisque le Premier Conseiller répandait ce que le Petit Roi disait plutôt que ce qu’il faisait. Et les sujets, insouciants, occupés par leurs besognes quotidiennes, préoccupés par leurs places dans le vaste monde, prenaient les paroles du Premier Conseiller pour de l’or en barre.

Et puis, le Petit Roi dépensa 205 000 écus en plus pour ajuster les portes et les fenêtres, 710 000 en plus pour aménager la cour et 100 000 en plus pour le jardin. Le petit Roi dépensa 1 000 000 écus en plus pour faire les travaux de 620 000 qu’il avait précédemment retirés sans modifier le montant initial. Ses amis, les constructeurs, se frottaient les mains. Pendant ce temps, ses sujets, toujours aussi occupés et préoccupés, ne se rendaient pas compte que le prix était passé de 6 600 000 à 7 600 000 écus. Le Petit Roi avait annoncé à une assemblée du peuple où peu de sujets s’étaient déplacés qu’il y aurait d’autres travaux à prévoir pour finir le chantier. Finalement ce prix allait monter encore et encore…

Et le Petit Roi répétait, à qui voulait l’entendre, qu’il savait contrôler les dépenses et que le montant dépensé était bien 6 600 000 écus. Et le Premier Conseiller, qui répétait les paroles du roi jusqu’à satiété, en arrivait à convaincre le bon peuple que le montant dépensé était 6 600 000 écus. Les sujets entendaient sans écouter. Il faut dire qu’ils étaient occupés et préoccupés …

Des melons ont jadis poussé dans ce petit royaume. Bientôt, poussera-t-il aussi des écus?


La morale de cette fable :
Les puissants qui nous gouvernent y reconnaîtront peut-être les entourloupettes (ce que l’on appelle « les stratégies » dans le langage d’aujourd’hui) qu’ils savent utiliser avec brio.
Tout le monde pourra y trouver une recette de cynisme politique dans l’art de tromper le peuple naïf tout en ayant l’air de respecter un budget. 

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Commentaires
C
Le Petit Roi? Plutôt Le Prince ... de Machiavel
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Outremont Autrement
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