Affaire HARBOUR, PATENAUDE et MAILHOT: le mandat KPMG, l'administration Tremblay, la SQ
Que la Cour d’appel ait adouci la peine de Stéphane Harbour n’est guère surprenant. Stéphane Harbour avait plaidé coupable à des bagatelles (2000$ d’argent public utilisés frauduleusement) qui avaient occulté le scandale beaucoup plus grave des dépassements de coûts de construction du centre communautaire (+ 6 mls $) non encore élucidés.
Rappelons les faits.
Stéphane Harbour a été contraint de démissionner le 11 octobre 2007 dans la foulée du rapport KPMG qui avait mis en évidence des malversations comptables de son administration. C’est la sur-médiatisation (orchestrée) de ce rapport qui avait poussé Stéphane Harbour vers la sortie. Il était question de cours d’anglais payés par les fonds publics via un montage crapuleux et de consommation abusive d’alcool dans la salle de préparation du conseil. De quoi émoustiller l’opinion publique avide de spectaculaire!
Ce rapport avait été commandé par qui ? Par la ville de Montréal, dont Gérald Tremblay était alors le maire, dont Frank Zampino était président du comité exécutif. Stéphane Harbour, Gérald Tremblay et Frank Zampino étaient tous des élus du parti « Union Montréal ».
Quand on analyse de près le mandat de KPMG, on constate qu’il était limité et ciblé. Il visait certaines personnes et des peccadilles. Il ignorait la gestion de la construction du centre communautaire. Il s’arrêtait exactement là où « les vraies affaires » pouvaient être débusquées.
Ce mandat stratégique était fait sur mesure pour attaquer quelques personnes triées sur le volet, pour en faire des boucs émissaires (des « pommes pourries »), pour s’en débarrasser à grands coups médiatiques, pour les offrir en offrande au bon peuple mystifié.
Ce mandat était fait sur mesure pour faire tomber les éléments de première ligne (le maire Stéphane Harbour, son conseiller politique Jean- Claude Patenaude et le directeur d’arrondissement Yves Mailhot), dont les présences devenaient gênantes et dérangeantes pour l’administration Tremblay et le système de copinage lié au parti libéral dont Union Montréal était le fer de lance.
Ce mandat limité était taillé sur mesure pour protéger l’essentiel : le système de corruption à l’œuvre à Outremont et dans le monde municipal.
Le stratagème derrière ce mandat : il s’agissait avant tout de discréditer Stéphane Harbour, de l’éliminer, de faire diversion pour satisfaire une opinion publique anesthésiée et protéger en amont les intérêts douteux de l’administration Tremblay et du parti libéral du Québec. Il s'agissait bien d'un stratagème monté, planifié, exécuté, fait pour tromper tous ceux qui ne partageait pas les intérêts occultes au pouvoir. Le système a tellement bien protégé ses intérêts qu’il a même réussi à se reproduire à l’identique : il a remplacé Stéphane Harbour par Marie Cinq-Mars, elle aussi affiliée au parti Union Montréal. L’administration d’Outremont est restée sous le joug de la même famille politique! Fait à noter : Marie Cinq-Mars a parfois proposé les résolutions qui ont ouvert la porte aux dépassements de coûts du centre communautaire; elle a toujours voté pour; sans exception.
Un mandat suspect, un mandat terriblement efficace qui a piégé M. Harbour, Patenaude et Mailhot. La stratégie politique de ceux qui avait commandé ce rapport a atteint ses objectifs : la SQ ou l’UPAC (il est bien difficile de savoir qui fait quoi!) a mené une enquête et a porté des accusations contre Stéphane Harbour, Jean-Claude Patenaude et Yves Mailhot. Qui ont mené où? Nulle part puisque le ministère public a décrété en décembre 2016 et de façon précipitée et prématurée, l'arrêt des procédures contre Patenaude et Mailhot.
Le plus étonnant c’est que la SQ et l’UPAC n’ont JAMAIS élargi leur enquête aux dépassements de coûts de construction du centre communautaire. Alors qu’ils étaient les mieux placés pour ce faire, la SQ et l’UPAC sont restés immobiles. Pourquoi? Pour protéger l’entreprise Dessau qui avait obtenu le contrat de construction du centre communautaire? Pour protéger l’entreprise Dessau qui avait obtenu le contrat de construction du centre communautaire et dont la Commission Charbonneau a démontré les liens collusoires qu’elle entretenait avec le parti libéral du Québec? Pour protéger, in fine, le parti libéral du Québec?
Sans compter que les histoires d’enveloppes brunes et d’élections « clé-en-main » n’étaient un secret pour quiconque fréquente le petit monde politique d’Outremont.
Le rapport KPMG, tel que libellé, était un écran de fumée stratégique. Les accusations telles qu’elles ont été portées par la SQ aussi.
L’intérêt public a été piégé par les élites qui protègent, par les procédures qu’elles mettent en place, le système dont elles font partie et qui les nourrit. Et roulez manèges : le système politique et le système policier marchent main dans la main pour étouffer toute velléité de débusquer la culture de corruption qui gangrène nos institutions. Tant et aussi longtemps que lumière ne sera pas faite sur le scandale des dépassements des coûts de construction du centre communautaire, cette hypothèse restera d’actualité.